Junes et sa rabbanite

  • Junes Davis-Cohen

Alors voilà, il y a quelques semaines, je vous avais écrit une chronique sur mon père ce rabbin. À l’aise. Les doigts dans le nez à écrire, à peine 12 heures de travail. (Comment? Elle n’écrit pas en 10 minutes ses bidules, là?? Bon, j’exagère un peu, pas en 10 minutes mais pas en 12 heures non plus, entre les deux, pour toi, public!), mais écrire sur ma mère, c’est une autre histoire!

Cette femme de l'ombre, cette chevalière de notre table ronde, cette grande dame qui m’a donné la vie avec trois poussées, comme elle aime souvent me le répéter, et bien c’était moins facile les amis. Pour nous aider, je crois qu'il va falloir faire quelques flash-backs en arrière (pas de flash dance, oulalala , pas du tout le style de ma mère!):

Moi, quinze ans avec ma mère à Jérusalem devant le Kotel :

- Ma fille, c’est toi? C’est bien toi??

- Oui, maman c’est moi! Pourquoi tu me regardes comme ça ? Et pourquoi tu as envie de pleurer ? Qu’est-ce que j’ai fait encore ?

- Tu as les cheveux blancs ! Je t’ai laissée il y a une semaine chez ta copine à Natanya, les cheveux châtains, et maintenant, ils sont blancs (!!!!!!!!!!!!) comme Tata Hélène!

- Ah ça ? J’ai voulu devenir blonde platine comme Loana (la honte!), mais par accident, le produit n’a pas bien marché. Mais c’est pas horrible, non ? Je crois qu’à ce moment là, ma mère allait passer de l’autre coté de la barrière de sécurité du Kotel ! Et se convertir définitivement à une autre religion pour mieux renier mon existence. C’était le cheveu méché de trop. Quand j’y pense, je lui en avais fait voir de toutes les couleurs cette année-là, avec ma pseudo rébellion post-ado !!!

Moi, vingt-deux ans, re-châtain, oufff, rentrant de soirée à 3 heures du mat’ les chaussures à la main, tournant la clé le plus doucement possible croyant que toute la maisonnée dormait.

- C’est à cette heure-ci que tu rentres?? Tu étais où tout ce temps ?

Moi, qui ai frôlé la crise cardiaque d’entendre cette voix dans la nuit :

- Avec des copines.

- Fille des rues, va dormir, et tu peux crever pour que je te reparle un jour, attends que je le dise à ton père!!!!!

Le lendemain, sauvée par les arguments de ma sœur avocate (l’ainée, la chouchou par excellence de la famille), ma mère me pardonnera et ne dira rien à mon père (oufffff, merci sis!)

Moi, vingt-cinq ans et assise en face de ma mère, autour de sa table ronde, deux mois après mon mariage avec Mister Davis.

- Maman?

- Oui ?

- T'es ok si on t’appelle mamie dans huit mois?

- .....

- Maman? Tu ... Tu pleures ????? (Première fois de ma vie que je la vois pleurer de joie surtout pour moi, la vilaine des rues!!!)

- Viens par là que je t’embrasse ma fille. (Un bisou en plus !!!!!!! Mais...... depuis 94, année de ma bat-mitsva, je n’en avais pas eu, faut que je tombe enceinte plus souvent, alors!!)

Moi, trente-et-un ans, enceinte de six mois des twins, à New-York, allongée sur un lit d’Hôpital.

- Allô maman ?

- Ah ça tombe bien, que tu appelles, faut que je te raconte ce qui c’est passé dans la communauté avec ton père, à l’office du matin il y a....., Attends, je sens que tu n’as pas ta voix de d’habitude (seule une mère reconnait les allos de sa fille, comme les pleurs de son enfant) qu'est-ce qui se passe ?

- Tu fais quoi les trois prochains mois ? Parce que sur ce coup là, je vais vraiment avoir besoin de toi. Est-ce que tu peux venir ? Je suis à l’hôpital, j'ai.....

- Ne bouge pas ! Je saute dans le prochain avion (en l’attendant sur mon lit, je l’avais imaginée littéralement sauter sur un avion et voler à mon secours comme wonderwoman!)

À partir de ce moment là, maman est restée à mes cotés en laissant son mari, sa maman, qui à l’époque était encore avec nous (zal"), rien que pour venir s’occuper du canard boiteux de la famille, moi! J’ai passé les trois mois les plus merveilleux de ma vie. Pour la première fois, j’avais ma maman pour moi toute seule. J’avais le privilège absolu de lui prouver chaque jour que je n’étais plus si vilaine, que je n'ai jamais vraiment aimé les rues, et que le canard qui était en moi essayait de lui montrer à quel point je voulais être un cygne pour qu’elle soit fière de moi. Les fous rires, les confidences, et même les silences que nous échangions étaient de l'or. Ces moments magiques, uniques et rares étaient des pépites de la vie! Quand elle a dû repartir dans sa vie pour me laisser vivre la mienne à cinq, mon cœur s’est fendu en plusieurs morceaux, car je ne savais pas quand j’allais la revoir (vive NY et ses 8h de vol!!!). Ma raison avait repris le dessus en me rassurant: T’inquiète pas ma poule, y a les applis face time et Tango (gratis!). Tu pourras l’avoir au téléphone autant que tu voudras et prends un mouchoir, tu m’énerves à renifler comme ça depuis le début de la chronique! Depuis, pas une journée ne passe sans que je l’appelle. Une partie de mon oxygène journalier provient de nos appels quotidiens. Voire même, 2/3/4/5 fois par jour jusqu’à l’étouffer (« mais je suis dans mon bain, arrête de m′appeler, je te rappelle dès que je sors, oui, promis, quel pot de colle cette Junes! »).

Quelques mois après notre colocation, hélas la santé de ma grand-mère s’est dégradée de jour en jour. Ce n’était plus la mère qui était en action, c’était la fille qui était dévouée jour et nuit, corps et âme, pour s'occuper de sa mère jusqu’à son dernier souffle. Nous n’avons jamais été aussi fiers de ma mère. Elle nous a donné a tous une grande leçon de vie : l’amour, le vrai, sans rien attendre en retour.

Ma mère, moi et le futur :

- Qu'est-ce que tu ressembles à ta mère!!! Tu travailles pour chacun de tes enfants, pour ton mari, en silence, sans jamais te plaindre, on se sert de toi comme décharge émotionnelle, poubelle sentimentale que chacun appelle pour se soulager de ses maux quotidiens.

C'est pour cela que j'utilise mes mots pour toi, Maman, en ce jour d’après fête des mères pour te dire que: JE T'AIME. I LOVE YOU. ANI OHEVETH OTAH IMA CHELI. (Le dernier c’est de l’hébreu au cas où...pour les bilingues comme moi.)

À toutes les mamans du monde, qui font partie d’une chaîne de vie indestructible liée par l'amour inconditionnel envers leur enfant, même avec ses hauts et ses bas.

....... Et la Palme d’or de la chronique la plus sentimentale est : Junes et sa Rabbanite. Tonnerre d’applaudissements dans la salle!!!!!!!!!!!!! La foule est en délire, Justin Beber et Kim Kadarchiante appellent leur mère en larmes en citant les mots de Junes. Allez, Madame Davis, venez récupérer votre Palme, mais avant, Gérald, file-lui viiiiiiiite du démaquillant steuplait parce qu’elle a les yeux de panda ! À plus les mam's.

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