Une nuit pas comme les autres

  • Junes Davis-Cohen

Ce soir-là, je me suis endormie vers minuit devant mon ordi, tout en regardant ma série préférée du moment (Suits, costumes sur mesure, j’adore). Peu de temps après, j’ai la sensation qu’une minute s’est écoulée, j’entends que ça tambourine à ma porte d’entrée. Qu’est-ce qui se passe ? Je dois sûrement être en train de rêver, allez, on se remet à roupiller, mais j’entends que ça sonne. Alors là, plus de doute, je dois me lever.

C’est parti, échange ton pyjama Victoria Secret de 1950 contre un truc moins vieux. Enfile vite fait à tâtons ta perruque de travers, et cours à la porte pour ne pas réveiller le reste de la maisonnée. Mais qui ça peut être, en pleine nuit ? Je jette un rapide coup d’œil à travers le judas pour avoir ma réponse (Pauvre judas, il méritait pas de finir comme ça !) et je découvre un visage plus ou moins familier :

Ma voisine de palier! Elle veut quoi chez moi celle-là à....à 3h00 du mat’ ! Blata, cette même voisine qui me snobe quand je la croise avec sa poussette Bugaboo, édition limitée. Si c’est pour une urgence de sucre, je m’en fous, je lui dis que j’en ai pas ! Vengeance personnelle !

Lorsque j’ouvre la porte, je la découvre en larmes, qui me dit d’une voix paniquée :

– Mon mari a fait une crise cardiaque. J’ai besoin que tu gardes mon bébé, t’es OK ?

– Oh my God ! Bien sûr que oui.

– Je te préviens, il est malade. Il va chez toi ou tu viens chez moi ?

– Je viens chez toi, ne réveille pas ton fils en pleine nuit.

Je veux la suivre, mais dans la panique, j’oublie de prévenir mon homme.

Alors au pas de course, je vais dans la chambre prévenir Micka qui n’avait rien entendu, of corse ! J’essaye de le réveiller en douceur, mais comme seule réponse, j’ai un magnifique ronflement. Bon, j’ai compris, on ne va pas y passer la nuit, et je le pousse du lit.

– Eh mais ça va pas, t’es folle ? Qu’est-ce qui se passe ?

– Désolée Pipine, de te réveiller. Monsieur Zing, le voisin, a fait une crise cardiaque, et sa femme veut que je garde leurs fils.

– Pourquoi nous ? Elle n’a pas de famille ? Elle n’a pas d’amis ?

– Sûrement, mais pas à 3h du matin, et vivant sur le même palier. Je vais chez eux, garde juste ton phone au cas où.

C’est en courant que je me rends chez ma pauvre voisine qui me tend son fils en pleurs avant de filer. Je me retrouve face à ce bébé de 1 an et quelques mois, qui parle uniquement chinois. Premier réflexe de mère juive : le mettre tout contre moi pour le calmer, mais il se débat et pleure encore plus fort !

– J’ai compris, t’aimes pas ça. Pas la peine de pleurer si fort ! Tu sais, il y en a eu d’autres avant toi qui ne se sont jamais plaints. Je réessaye le giron de la mère juive, mais rien à faire, il se met à hurler encore plus fort. Et là, j’ai un flash-back de mes quinze ans, époque où je n’étais pas encore maman, mais babysitter, et je sens que je perds dangereusement confiance en moi. Allez, je me ressaisis, je ne suis pas à mes premiers pleurs. À nous deux, petit bébé: viens t’asseoir sur mes genoux. Et il se calme, me fixe, se tient droit comme un i.

– Waouh quel maintien ! Attend, fais voir si j’arrive à faire comme toi ? Oulala, laisse tomber, ça fait trop mal au dos ça, et hop, je reprends ma pose en accordéon, ce qui le fait éclater de rire. J’ai l’impression que tu te moques de moi, toi ! Alors je réessaye, et il rit de plus belle.

C’est officiel, ce bébé me charrie. Après dix minutes à faire le clown, comme toute babysitter qui se respecte, je décide de téléphoner à ma meilleure amie en Israël, puisque qu’il n’est que 9h chez elle. Youpi ! On va pouvoir papoter tranquillou, mais bébé n’est pas d’accord, et se remet à hurler. Me revoilà à le faire rire pour qu’il se calme. Je lui propose à boire, me fais un thé, et de boisson en boisson, voilà que j’ai besoin d’aller à la salle de bain. Malheur à moi: les parents, comme TOUS les parents avec un premier bébé, ont verrouillé tous les WC de la maison (je les ai tous faits). Comment vais-je faire ? Je décide de prendre petit bébé sous le bras, et de retourner chez moi. Je tape à la porte, (dans la panique j’avais oublié mes clefs !) et Micka tout ensommeillé m’ouvre. Je lui tends le bébé, et fonce à la salle de bain, mais il me rattrape :

– Ah non, non, non, je prends pas la responsabilité de prendre les enfants des autres. Tu l’emmènes avec toi !

– Mais enfin, sois pas ridicule, prends-le deux secondes.

– C’est ta responsabilité, pas la mienne. Tu te débrouilles !

– Ah non alors ! Déjà que je me tape nos propres enfants, qui pour je ne sais quelle raison ont l’impression que je pars pour la Sibérie dès que je vais aux toilettes, alors je ne vais pas prendre les enfants des autres en plus ! TU LE PRENDS !

– OK, t’énerve pas, t’es sur les nerfs en ce moment, c’est pas possible.

Reste calme Junes, reste calme !

Mon mari tape à travers la cloison, et me pose la question à 1000 euros :

– Mimine, comment il est leur appart ?

– Je sais pas.

– Plus petit, plus grand ? C’est rangé ? T’as regardé leur cuisine ?

Et je sors.

– Tu crois que je me balade avec un mètre dans mes poches pour prendre les mesures ? Arrête avec tes questions, faut que je reprenne mon poste, si la maman revient entretemps, elle va s’inquiéter si elle ne nous voit pas.

Je veux récupérer le bébé mais il reste accroché aux bras de mon homme.

Mon mari, qui a la carapace d’un ours, mais le cœur d’un ange, serre le petit garçon encore plus fort, lui fait visiter le salon avec la même voix qu’il prend quand il parle à nos enfants. Il l’entraine vers la cuisine, et lui propose des gâteaux.

– Mais ça va pas, il est 4h du matin !

– Il a peut-être faim le pauvre, tu crois qu’il aime le Nutella ?

– Ne lui donne rien, il est peut être allergique à quelque chose. Tu sais comment sont les américains avec leurs kilomètres d’allergies (d’ailleurs je n’ai jamais compris pourquoi. Nous les français, à part être allergique aux lundis matins, ça roule Grâce à D.).

– Tu as raison, je vais lui donner un cigare au miel, c’est plus prudent !

– Mais ça va pas bien, toi ! Rends-moi ce bébé, avant que les parents nous collent un procès.

– Regarde comme il adore ça.

Faut avouer que c’est dur de ne pas fondre devant ce joli tableau. Mais au bout de cinq minutes, je lui reprends le bébé rempli de sucre qui se remet illico à hurler (je crois qu’il m’aime vraiment pas !). Je retourne chez nos voisins, mais Micka me rattrape et me demande si on peut le garder, pour ne plus jamais le rendre.

– Je sais pas, je crois que c’était juste du dépannage pour cette nuit. Tu veux que je demande à Kim, si elle le vend ?

– Demande-lui, steuplait. T’oublies pas, d’accord ?

– D’accord.

Le petit s’est finalement endormi sur le canapé, la bouche toute collante, et ce n’est que vers 5h du matin que la maman rentre. Elle pose délicatement son fils dans son lit (chaque fois que je fais ça avec mes enfants, ils se réveillent de plus belle, c’est pour ça que je n’ai pas pris le risque de le remettre), et je lui demande comment va son mari. Elle m’informe qu’il est hors de danger.

– Ouf, thank God ! Bon bah, moi je vais y aller ! Si y a quoi que ce soit que …

Mais Kim s’effondre en pleurs sur le canapé en prenant sa tête entre les mains. J’ai trop de peine.

Je m’approche d’elle, lui tapote le dos, et essaye de la rassurer comme je peux. Elle se tourne vers moi, et d’instinct je la prends dans les bras (elle dit pas non, elle !).

Cette voisine, que je croise une fois de temps en temps dans le couloir ou dans l’ascenseur m’autorise à la consoler, moi, une inconnue, une étrangère. Comme mon mari m’a dit, je ne suis ni son amie, ni sa famille, je suis juste là, sur ce canapé, à 5h du matin, et c’est ça qui compte le plus à mon sens. Dorénavant, les choses ne seront plus jamais les mêmes, entre elle et moi car je suis sûr j’aurai le droit à bien plus qu’un bonjour !

Et c’est ainsi que je passe le reste de la journée en mode loque humaine de fatigue, que je réponds à l’avalanche de textos que mon mari m’envoie, pour lui dire que NON, la voisine NE VEND PAS SON BEBE !

Mes très chers lecteurs,

j’espère que cette histoire vous a plu, en tout cas, j’ai adoré l’écrire. Je voudrais vous annoncer que Junes Davis prend une pause de quelques semaines. Oui, je sais, je sais, ça m’embête autant que vous, mais mes enfants sont en vacances, et comme vous le savez, quand ils sont avec nous, on ne peut même pas envoyer un texto, alors vous imaginez écrire une chronique (ah moins que je ne me réfugie dans l’appart de Kim, qui est super joli en fait !).

Je reviendrai si D. veut bientôt, plus en forme que jamais, avec une nouvelle formule de posts. Merci encore pour ce grand kiffe que l’on a partagé ensemble chaque semaine. Je vous embrasse fort fort fort et vous dit à très bientôt. Je reste là pas loin en cas de besoin....

Avec tout mon amour Junes Davis.

PS : pour le livre, je boucle encore quelques trucs, et c’est dans la boite mes friends.

Will miss you guys !

Une nuit pas comme les autres
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