Nos jours heureux versions U.S.A. 🇺🇸🇺🇸

Quand mon fils m’a demandé s’il pouvait aller dans la même colo amerloque que son copain de classe, j’ai dit : OUI ! 

À plus de dix ans, il est grand temps que mon chouchou sorte un peu de sa zone de confort quotidienne, et aille voir si l’herbe est plus verte ailleurs ! Il va surtout se rendre compte à quel point c’est génial d’être chez papa-maman ! Ce sera une bonne façon de régler définitivement ces incessants caprices, auxquels bon nombre de mothers sont confrontées : 

– C’est quoi ces machins verts que tu m’as cuisiné ? Comment as-tu pu croire une seule seconde, que j’allais les manger ? 

– Mes machins, comme tu dis, sont des haricots verts sautés, et tu vas me les manger, et que ça saute ! Compris ? 

 

Et c’est avec un sourire machiavélique que j’ai rempli le formulaire d’inscription ! Je l’imaginais face aux plats préparés pour toute une collectivité, en me disant que là-bas, il n’y aurait pas de place pour ses scandales (qui n’ont rien à voir avec la série !). 

 

En me renseignant auprès de mommies de l’école, j’ai appris avec grande inquiétude, que la colo version U.S., dit le « Sleep away camp », dure entre quatre et huit semaines. Oui, vous avez bien lu, les amerloques envoient sans pitié leurs mouflets en camp d’été entre un et deux mois ! À la base, j’étais sûre que c’était comme en France, deux semaines et demi, trois maxi’ ! La question était de savoir, si j’étais moi-même prête à être séparée aussi longtemps de mon petit bouchon. 

Tout à coup, les haricots verts n’avaient plus autant d’importance… 

 

Ce que je ne savais pas, c’est que ma fascination pour l’organisation américaine, gérée au millimètre près, allait vraiment monter d’un cran, bien que moi-même, je commençais à être à cran, rien qu’en imaginant ma vie sans mon ainé. 

 

Une semaine avant la date de départ, nous avons reçu un mail, qui nous indiquait que deux petits jeunes (alors qu’en vrai, ils étaient grands et costauds) passeraient récupérer les valises de chaque enfant, dûment complètes, afin d’être déposées directement au pied de leur lit. Comme ça, les petits colons partiront tranquillou, avec un simple sac à dos le jour J. 

Ça m’a direct fait penser aux elfes de maison de Poudlard, qui s’occupaient de tout comme des esclaves. 

 

Et c’est le jour du départ… 

 

C’est avec des larmes déchirantes que je demande à Ethan de s’éclater, en évitant de se faire éclater par d’autres gamins. Le point de rendez-vous est dans une école au fin fond du New Jersey. J’ai demandé à mon mari d’y aller, car je voulais épargner à notre fils une honte certaine, pour ne pas lui bousiller dès le départ, toutes ses chances de se faire des copains. Au moment où le bus allait démarrer, j’avais une image très nette d’un moi, complètement hystéro, qui se serait accrochée au pare-chocs, en hurlant : 

– MAMAN EST LÀ, CHÉRI ! MAMAN PART AVEC TOI ! MAMAN NE TE LAISSERA JAMAIS ! MAMAN T’AIIIIIIIIIIME ! 

 

Je serais arrivée sur place les genoux en sang, écorchés de partout, à force d’avoir été trainée pendant tout le trajet. Ethan se serait entre temps caché sous les sièges, en faisant semblant de ne pas savoir qui était cette française folle à ses trousses. Bref, il était plus prudent de noyer ma peine de la séparation chez thérapeute bien aimée (le pire, c’est que j’exagère à peine!). 

 

Donc, quand Micka est revenu, je lui ai sauté dessus de questions, en lui demandant de me raconter avec précision comment tout s’était passé, et s’il lui avait bien jeté de l’eau de partout comme je lui avais dit de le faire (lorsque l’on souhaite qu’une personne revienne d’un voyage, on lui jette de l’eau dans le dos ! Coutume que j’ai piquée aux tuns’, quoique… en y repensant, mon vol ne s’arrête pas là, puisque je leur ai pris tous leurs plats se terminant en HLA ). La seule chose que mon mari m’a répondu, mis à part que le petit était trempé, c’est qu’il avait été impressionné par la clientèle « So Posh » qui avait déposé leur progéniture ! 

– Ça veut dire quoi « So Posh » ? Tu veux dire snob ? 

– Quoi snob ? Quand j’ai demandé si les enfants allaient faire du camping, un peu comme aux E.I., les mono se sont mis à rire, et m’ont répondu : 

– Lol, elle est bien bonne celle-là ! Bien sûr qu’ils vont camper, mais à l’hôtel ! 

– Arrête ! Trop marrant ! 

– Ouais, ouais trop drôle. Je te conseille vivement de choisir ta tenue à l’avance, pour le visiting day ! 

 

Ah oui ! Parce que, un peu comme les prisonniers qui ont le droit à un coup de fil de dix minutes une fois par semaine, au bout de trois semaines, nous avons le droit de venir passer une journée entière avec nos kids. 

 

Et c’est avec certaine appréhension que tous les lundis, j’attends cette saloperie de coup de fil qui ne venait pas ! 

 

– Chéri, je te préviens, si dans dix minutes, il appelle pas, j’appelle la police ! 

– Mais non, détends-toi, je viens de le voir en vidéo, tout va bien. 

À défaut de communiquer directement, la colo envoie tous les jours des photos et des clips pour nous montrer combien nos enfants s’amusent (sans nous) ! 

Mais soyons clair avec ça, bien que la vidéo dure quinze minutes, tant que j’ai pas aperçu mon doudou, je m’en fous royal choucroute des autres ! Ah, le voilà, mince, on dirait que mon petit poussin a l’air effrayé d’être en dehors de sa coquille familiale…

Du coup, c’est avec impatience que j’attends le jour de visite. 

 

Trois micro coups de fil, et trois semaines plus tard, dimanche matin, 6:00 AM, nous sommes avec nos poulettes, en voiture pour deux heures de route vers le camp Seneca. La vérité, y a que mon fils qui peut me faire lever du lit aux aurores un dimanche matin ! Au vu des infos de Micka, bien que ce soit en pleine cambrousse, j’ai opté pour des talons, et une robe «  the Kooples ». 

Bref, on met la musique à fond, et le cap vers la Pennsylvania. Fort est de constater que dès qu’on sort de Manhattan, on respire l’air pur, et mon D., ce que ça fait du bien ! 

 

Au bout d’une heure trente, je lis avec surprise que nous allons traverser une ville qui s’appelle Goshen. Puis à quelques mètres, je découvre une pancarte avec écrit des phrases en hébreu. Il est indiqué qu’il y a une Yechiva pas loin : 

–  Chelou, non ? Une Yechiva au fin fond des États-Unis, c’est marrant, quand même. En plus, Goshen, ça me dit grave quelque chose ! 

Je déverrouille mon cerveau rouillé, et ça tilte ! Ça y est : Goshen, c’est la ville que Pharaon a donné à Yossef, quand il l’a nommé vice-roi (ça faisait partie de son package d’expat!). 

Je trouve cela tellement formidable que j’en parlerai/radoterai pendant plusieurs kilomètres, et on arrive… ENFIN ! 

 

Impossible de se tromper, puisqu’il y a des tonnes de banderoles qui nous indiquent que nous sommes déjà dans le camp. On repère de loin une bonne trentaine de personnes avec des gilets fluo avec inscrit : STAFF ! On nous demande de nous garer dans un endroit en plein air. Je suis choquée par le nombre de voitures ! Ensuite, à peine sortis, on nous montre que les familles doivent monter dans un school bus, (les jaunes, les mêmes que l’on voit dans les films ) pour les six minutes qui nous séparent de la colo ! Y’a pas à dire, question organisation, ils sont au top ! 

Je ne vous cache pas que dans le bus, c’est un peu le Salon de la chirurgie, parce que la plupart des Jewish mamas ont fait des stages intensifs à Silicone Valley ! Ensuite, pour le dress code : Short en jean méga, mais méga court ! Tellement court que t’en es limite prise de court avec ta robe longue… et de la fenêtre, j’aperçois… MON FILS ! Je deviens folle, pour descendre la première, je pousse toutes les bouches de mérous et les sacs de créateurs que je croise. Je dévale d’un trait les trois marches, et comme au ralenti, je prends mon petit chéri dans mes bras, et on se serre un très long moment. Of course, on pleure comme des fous de s’être enfin retrouvés. Comme on dit : « un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ! ». Mon D. qu’est-ce que ça va être quand il va se marier… 

 

Après la séquence émotion, on commence la visite, et c’est… Eurodisney ! Je n’ai jamais, jamais vu ça de ma vie entière ! Déjà, la colo fait 1500 hectares, et gère mille enfants. Le staff se déplace en voiturette. Non mais allô ? Quand mes parents faisaient leur colos, c’était pas ça du tout (pour ceux qui se souviennent de Varzy!). Dès que je tourne la tête, je vois des piscines, des courts de tennis, des terrains de basket, des châteaux gonflables… et un mini-bar/colo-bar... enfin, mini…dans mes souvenirs, papa allait chez Métro, faisait le plein de chocolats, de canettes, puis basta quoi… Mais là ! C’est carrément un magasin, avec des néons, les boissons clignotent, avec des affichages électroniques de millions de « snacks » différents pour ces petits choux MÉGA gâtés ! 

 

Après, mon fiston nous emmène dans son dortoir, pour nous montrer, là où il dort. On trouve deux femmes de ménages. Chez papa, c’était nous, les femmes de ménage ! Faut vraiment que j’arrête de comparer parce que, à force, ça peut devenir pénible ! 

Il ne me faut pas longtemps pour comprendre que c’est le paradis sur terre selon… moi ! Car quand je papote avec Ethan, il m’en raconte des belles (il m’a donné son autorisation de vous le raconter je précise !). Il me confie que tous les chabbats après-midi, les garçons peuvent inviter les filles pour une balade chabbatique : 

– Oh comme c’est chouchou, j’adore ! 

– Ah non, ça n’a rien de chouchou, comme tu dis, c’est hyper galère ! T’as déjà invité une fille à marcher avec toi ?

– Bah non. 

– Bah voilà, tu peux pas comprendre ! Elles sont toujours en bande, tu peux jamais en coincer une sans te taper la honte. 

– Alors qu’est ce que t’as fait, au final ? 

– Il y avait une petite mignonne que j’avais repérée. J’ai attendu qu’elle soit sans ses copines, et je lui ai demandé. Cette lourdeur m’a dit OK, et quand je suis partie la chercher, elle a dit qu’elle avait changé d’avis. 

Alors mes amis, quand votre enfant vient vous confier une petite peine de cœur, il y a deux façons très nettes de réagir : 

 

La première dite la classique : 

–  C’est vraiment une débile celle-là ! Cette petite idiote ne sait pas ce qu’elle perd. T’es le plus beau, et si je croise cette peste, crois-moi, elle va passer un sale quart d’heure ! Viens, mon amour, maman est là, plus personne ne fera de mal à ton petit cœur. 

 

Et puis vous avez la deuxième dite l’immature : 

– Comment tu t’es pris une grosse crampe ! Comment tu t’es fais jeter ! Je suis mdrrrr ! Oh la la, mon petit lapin, c’est que le début, t’as pas fini ! Allez, souris, c’est marrant ! Non, ne me dis pas que t’en as carrément pleuré ! Eh ! Va falloir te renforcer, viens je te raconte ce qui m’est arrivé, un jour. Un fois, moi aussi j’ai voulu… etc.

 

Je vous laisse deviner quelle a été ma propre réaction…

 

Pour les petits frères et sœurs des colons en visites, le directeur a fait venir des tas d’animaux. Dès que mes poulettes ont vu les poneys, elles ont voulu en faire. Je vous laisse deviner ce que… et hop on passe et c’est l’heure de rentrer… déchirement mutuel, bien que nous savons que nous allons nous revoir dans moins de dix jours. Notre chou nous accompagne jusqu’au bus, pour refaire le chemin inverse. Je le prends dans mes bras une dernière fois pour lui dire à quel point je suis fière qu’il se débrouille aussi bien tout seul comme un grand qu’il est ! 

 

Sur le chemin du retour, je reparle encore de cette histoire de ville de Goshen (la fille qui s’en remet pas), et fais le point sur ce rêve américain que notre enfant est en train de vivre. Je ne peux m’empêcher de me dire que bien que tous les ingrédients soient réunis pour que les enfants soient au top, à tous les niveaux, je reste persuadée que rien ne vaut une bonne petite colo, avec des animateurs aussi insouciants que les enfants, et non une usine où l’on combat l’ennui, minute par minute, où tout est cadré au millimètre près, car les vacances, au final, c’est quoi ? C’est fait pour s’ennuyer, et se faire des amis…

 

C’est pour ça qu’après discussion, quand Ethan est revenu, on s’est tous mis d’accord, que l’année prochaine si D. veut, il ira dans une institution beaucoup moins Posh, mais tellement plus que ça ! 

 

Je vous embrasse, et vous retrouve mercredi pour une spéciale : Comment s’habiller pour les fêtes de Tishri ?  

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